Compte-rendu des Journée nationales pour l’accès au livre et à la lecture 2017

Braillenet, coorganisateur des Rencontres nationales du livre numérique accessible avec Auvergne-Rhône-Alpes Livre et Lecture et l'Enssib, a rédigé un compte rendu écrit des 1ères journées nationales pour l'accès au livre et à la lecture 2017. L'Agence reprend ici ce compte rendu pour le diffuser.

Journée sur l’accès au livre et à la lecture : les professionnels mobilisés

Le 7 décembre, BrailleNet, l’Arald et l’Enssib ont organisé une journée professionnelle sur l’accès au livre et à la lecture pour les personnes en situation de handicap. Plus de 80 acteurs de ce domaine se sont déplacés à Villeurbanne à cette occasion.

Destinée à l’ensemble des professionnels du livre, cette journée fut l’occasion de mettre en avant les évolutions techniques et juridiques en faveur de la production et de la diffusion de livres accessibles ainsi que les possibilités offertes par les nouvelles technologies et les formats standardisés. Des ateliers thématiques animés par des intervenants experts ont permis d’analyser les enjeux à chaque étape de la chaîne éditoriale. Que ce soit l’éditeur, le producteur de livres adaptés, le bibliothécaire, le développeur de solutions Web pour les bibliothèques et les librairies en ligne, les développeurs d’applications de lecture numérique, l’enseignant ou même le lecteur, chacun à une part de responsabilité et un rôle indispensable à jouer.

Yves Alix, le directeur de l’Enssib, Laurent Bonzon de l’Arald et le président de BrailleNet, Bruno Marmol, ont ouvert la journée.

Évolutions techniques et juridiques en faveur de l’accès au livre

Claire Leymonerie, du Ministère de la Culture, a dressé un état des lieux d’un cadre juridique qui a récemment été modifié en France et qui est en cours d’évolution au niveau européen.

En France, l’exception au droit d’auteur en faveur de personnes en situation de handicap permet à des organismes à but non lucratif de produire des versions adaptées et pour ce faire oblige les éditeurs à mettre à disposition les fichiers numériques de leurs livres. La réforme de 2016 du code de la propriété intellectuelle vise à élargir l’offre de livres accessibles grâce à un nouveau partage des tâches entre les éditeurs et les services d’adaptation. Une définition plus large du périmètre de l’exception, une obligation de déposer des formats structurés, et la nécessité de déposer automatiquement et sans délais les livres scolaires devraient favoriser une meilleure production de documents adaptés. Une mutualisation des documents adaptés via la plateforme Platon vise également à améliorer la productivité.

L’acte européen d’accessibilité, en cours de négociation, sera effectif en 2018 puis transposé d’ici 2020 par les États membres. Élaboré pour favoriser une société numérique inclusive au sein du marché unique européen, ce texte pose les exigences fonctionnelles en accessibilité pour l’ensemble des services numériques, y compris ceux de la chaîne du livre.

Alizé Buisse (Arald) a ensuite présenté l’exemple de Lectura+, un site de valorisation du patrimoine écrit et notamment de la presse ancienne, ce qui a permis d’illustrer une mise en pratique du format EPUB pour rendre des contenus accessibles au plus grand nombre.

Tous les maillons de la chaîne mobilisés pour trouver des solutions ensemble

La matinée s’est clôturée avec la première session d’ateliers participatifs restitués en amphithéâtre.

L’atelier « Publier » conduit par Luc Audrain (Hachette Livre et animateur du groupe Normes et Standards du SNE) et Alex Bernier (BrailleNet) a mis en évidence l’importance de la structuration des documents. Bien former dans les centres de transcriptions à l’utilisation de styles, conserver la sémantique des contenus, faire un effort sur la signalisation de l’accessibilité sont autant de bonnes pratiques à partager et ce, dès le début de la chaîne.

Dans l’atelier « Acheter » encadré par Philippe Lenepveu (Tosca Consultants), on a notamment mis l’accent sur l’importance d’inscrire les exigences d’accessibilité dans les cahiers des charges, par exemple, lors de la refonte d’un site ou pour la création d’une application. En s’appuyant sur les référentiels existants, c’est à l’acheteur de s’assurer avant, pendant et après que les critères d’accessibilité ont bien été intégrées.

Lors de l’atelier « Orienter » avec Françoise Fontaine Martinelli (Université Lyon 1), les participants ont fait remonter la problématique de l’engagement des élus à soutenir les démarches en faveur de l’accessibilité. À la fois challenge et stimulation, les évolutions dans ce domaine nécessitent de mettre à jour les compétences des agents publics, de pouvoir certifier et de faire connaître les expériences qui ont fonctionné.

Après la pause-déjeuner les participants ont été invités à assister à des démonstrations de divers outils de lecture avant de participer à la deuxième session des ateliers.

L’atelier « Lire », coordonné par Fernando Pinto da Silva (EDRLab) et Marion Berthaut (Mobidys), a soulevé le manque de convergences entre les besoins – très variés selon les handicaps – et les outils de lecture proposés. Trouver un outil de lecture ou un format qui convient à l’ensemble des usages et des besoins relève du véritable défi. S’y ajoute la question de la prise en charge ; les outils grand public nativement accessibles ne sont pas forcément pris en charge et les outils remboursés ne sont pas toujours les plus adaptés.

L’atelier « Mutualiser » coordonné par Chloé Cottour (BnF) et Nicolas Églin (CTRDV) s’est penché sur le travail d’adaptation centralisé par la plateforme Platon et la mise à disposition des ouvrages adaptés via les bibliothèques en ligne telles que la BNFA ou Eole. Les participants ont souligné l’importance de mutualiser les méthodes d’adaptation qui peuvent varier énormément selon le type de livre et le centre de transcription. Le besoin de pouvoir signaler le niveau d’accessibilité des fichiers déposés sur Platon aussi bien pour les professionnels de l’adaptation que pour les lecteurs a également été articulé.

Le dernier atelier « Inciter », animé par Sophie Martel, a exploré plusieurs pistes pour mobiliser l’ensemble de la chaîne et augmenter le taux de livres nativement accessibles ou adaptés : la formation à tous les niveaux ; plus de recours à des aides financières qui promeuvent l’accessibilité numérique (aide CNL, en région, DRAC, FIPHIP…) ; une meilleure prise en compte des exigences en accessibilité dans l’édition et le contrôle de marchés publiques ; la mise en place de sanctions pour les organismes qui ne respectent pas leurs obligations légales ; la certification pour mettre en valeur les bonnes pratiques.

Des pistes pour une meilleure prise en compte de l’accessibilité

Afin de conclure cette journée, ont été rappelés les besoins immédiats :

  • de formation pour l’ensemble des acteurs (métiers du Web, de l’édition, transcription, etc.) ;
  • de passer d’une production artisanale à une production industrielle afin de monter en efficacité pour répondre à des besoins d’adaptation de documents dans des délais très courts ;
  • de passer d’approches locales voire d’initiatives personnelles à la mise en place de politiques globales pour traiter les questions de l’accessibilité ;
  • de valoriser les pratiques en faveur de l’accessibilité grâce à la certification.

Car pour devenir une réalité, l’amélioration de l’accès au livre et la lecture pour les personnes handicapées nécessite de l’ensemble des acteurs de la chaîne de plus et mieux collaborer, afin de poser les jalons de pratiques efficientes et inclusives.